Revivons quelques instants, à travers mille belles images collées sur la rétine et sur l’écran, cent belles musiques restées dans l’oreille et quelques souvenirs encore chauds, l’aventure douce de la Bourgogne. Le beau charivari. Le bateau quitte le port tout en lenteur. Il grimpe l’écluse en chassant les derniers nuages, voilà le ciel à son premier matin qui se découvre. Déjà les voix s’épanchent, pas encore éblouies, juste joyeuses de retrouver les essentiels. Partout chapelles, églises et cathédrales jouent à donner vie aux roches les plus solides. Au seuil enluminé de Paray-le-Monial se dessinent des airs d’Andalousie, presque des idées de Maroc. La pierre y danse au rendez-vous des soirs. À Ougy, des restes de couleur vibrent sous nos voix qui se font (la citation qui suit n’est pas de moi) « plaisir dans toutes les positions ». À Tournus, tous les Philibert et toutes les Philibertine de Bourgogne se perdent sur le chemin des ombres, dans la cripte inachevée, penchés vers le fond d’un puits d’où leur sourit, perché sur les hauteurs – où est le nord ? où est le sud ? le haut ? le bas ? l’est et l’autre est ? Françoise ne sait plus – la face de singe boursouflée de Gerlannus. À Chapaize naît dans la nudité romane un cri. Le cuivre griffe la pierre. Des oreilles se bouchent. Des bouches s’ouvrent. Des profondeurs jaillit la musique nouvelle. La griffure devient caresse. À Autun, l’âne sourit, l’âme aussi, quand le cor des Alpes refait de la cathédrale une montagne. Si l’âne sourit, c’est parce qu’il a entendu la prière du pâtre. Si l’âme fait de même, c’est parce qu’elle a chanté Rachmaninov.