Blog suisse de littérature

Les obstinés d'hiver

  • Vincent Francey

Dimanche matin nuageux. Il a neigé. Il serait raisonnable de rester à la maison. Je démarre la voiture. Pour où ? Pour le nord. Je m'arrêterai quand le hasard des playlists me fera chanter avec Thomas Fersen. Tout ceci est arbitraire, mais fatalement, puisque <link https: www.youtube.com aime les>Sanseverino aime les Sénégalaises, le brave Thomas racontera bientôt quelques amours fantasques de chauve-souris et de parapluies. D'ailleurs, il se met à pleuvoir. Il est dix heures trente, les essuie-glace dansent, j'ai passé depuis belle lurette Morat, Berne et Münchenbuchsee, Renaud, les Ogres de Barback et Juliette, mais toujours pas de Thomas Fersen à l'horizon, de plus en plus bouché. Demi-tour ? Sortie à Bienne, mon adresse sur le GPS, retour à la case départ, à moins que Thomas. Sanseverino se noie <link https: www.youtube.com les>dans les embouteillages, Claude Nougaro se perd entre un coq et  une pendule, où êtes-vous passés, pépins et chiroptères  ? À la sortie de Hagneck, le gentil <link https: www.youtube.com se décide>Thomas se décide enfin : c'est la chance qui me sourit. Je m'enfonce dans la forêt, dépasse deux vieux en balade, m'arrête devant le panneau qui interdit d'aller plus loin, puis dégaîne mon appareil-photo et mon petit carnet noir.

En forêt, près de Hagneck

Pluie, neige, deviner un lac sous les arbres.

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Des oiseaux s'obstinent.

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Des marcheurs s'obstinent.

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Un chien : ils l'obstinent.

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La pluie tombant sur la neige : métaphore.

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Le vent aussi : s'obstine. De quelle tempête est-il la métaphore ?

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Des trous dans la neige, des feuilles mortes, des arbustes. Eux aussi : s'obstinent.

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Sans les obstinés d'hiver, pas de printemps.

Il pleut. Ma voiture rédémarre. Retour au bercail, à moins que Thomas. Des étendues planes, le Seeland, terre noire cachée sous une couche de blanc de plus en plus fine à mesure que la pluie tue la neige. Pas loin : le pénitencier de Bellechasse. Pourquoi me suis-je aventuré en de telles contrées ? Francis Cabrel, Alexis HK, à nouveau Thomas Fersen. S'arrêter ? <link https: www.youtube.com bucéphale>Bucéphale : le cheval d'Alexandre le Grand. Nommer ma voiture ainsi : ça aurait plus de gueule que VW Polo. Peut-être de plus palpitantes aventures en perspective. Je m'arrête au bord d'un lac. Est-ce le même que celui que les arbres cachaient tout à l'heure ? À Hagneck, c'était le lac de Bienne. À Cudrefin, c'est celui de Neuchâtel. Cela ne change pas grand chose. 

Port de Cudrefin

Il pleut. Le lac est vert et mes mains sont trop froides pour écrire.

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Les pompiers, les pompiers, le père, les enfants. Ils chantent aussi faux qu'une sirène. De pompiers, de pompiers.

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Seins nus sur un bateau : chair de poule.

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Des carrés blancs sur l'autre rive : Neuchâtel.

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Bateaux d'hiver à terre. Nudité du lac. Tenir les chiens en laisse, disent les arbres. En arrive un. Laisse rouge. Sans maître.

Il pleut. Mes mains pleurent. Bucéphale trotte vers la maison. Thomas chante encore. Croque. Non merci, je rentre. La conquête du monde est reportée à des jours plus chauds.


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A propos

Lie tes ratures, littérature, ce blog se veut l'atelier de mon écriture. J'y déverse en vrac des notes prises au jour le jour, l'expansion de ces notes en des textes plus élaborés, des réflexions et des délires, des définitions et des dérives, bref tout ce qui fait le quotidien d'un homme qui écrit, ici, en Suisse, ailleurs, dans mes rêves et à travers le monde qui m'entoure.

Bref, ce blog suisse de littérature partira dans des directions variées qui, je l'espère, sauront vous parler.