En deux mois, t’es dans la caisse. Les ouvriers sont joyeux ce matin. Cancer foudroyant. Toi, t’as pas une pompeuse vibreuse ? Lui prêtera-t-il celle à ruban ? Vu le double-mètre et les stylos dans la poche, on peut lui faire confiance, il connaît le métier. Le plus compliqué, c’est encore de la nettoyer, non ? Le problème, c’est qu’elle devient dure. Mais en demi-heure, c’est bon. La scie circulaire aussi, ça marche bien. Avec une cloche de huitante, ça peut aller, mais des fois, il faut du huitante-cinq. Tu peux acheter un petit coffret. T’en as huit pour deux-cents. Attention, des fois, il y a le mandrin qui pisse, mais sinon, c’est pas mal du tout. La serveuse – celle-ci, ce n’est à coup sûr pas une dame du service – est aussi pas mal du tout. Comme toutes les femmes, elle ne comprend rien à l’outillage et à la maçonnerie. D’ailleurs, ces ouvriers du bâtiment sont-ils maçons, électriciens, terrassiers, peintres ou gynécologues ? L’infirmière m’a mis dehors sur un lit avec de l’eau, un café et un bout de pain, déclare l’un d’eux. Bien fait, pense la serveuse, qui n'en peut plus de tous ces machos. Le plus compliqué, c’est encore de les nettoyer, non ? Surtout si t’es sensible. C’est gluant, ça gueule, c’est violet, ça te donne envie de dégueuler et en plus, des fois il y a le mandrin qui pisse alors bon, on fait peut-être un boulot pénible, mais on aurait pu tomber pire. La serveuse est souriante. En effet, on aurait pu tomber pire.