C’est l’heure où se croisent ouvriers et retraités. Les maçons ont déjà l’œil fatigué, les vieux aussi. Le peintre soupire. L’électricien se concentre : surtout ne pas perdre le fil du Matin. C’est lundi, les autres sont en vacances. La pause sera un peu plus longue que d’habitude. Le patron est loin. Arrivent d’autres peintres au regard ahuri : t’es déjà à la pause ? Le premier peintre soupire : le patron est loin. Les maçons veulent payer. Ce n’est pas parce que le patron est loin que. De toute façon, bientôt, ici, il n’y aura plus que des vieilles qui viennent chercher le pain. L’électricien tourne les pages de plus en plus vite. La pause pour lui aussi va se terminer. Seuls les retraités ne sont pas stressés quand ils boivent leur café du matin. Pour eux, il faut faire durer le plaisir, parce qu’après, c’est retour à la maison, penser au dîner même si on n’a pas faim, allumer la télé, regarder les Z’amours en se demandant ce qu’elle pense de tout ça, la femme, et si on répondrait la même chose aux questions. Elle ne pense rien de bien folichon, la femme, parce qu’avec le temps, comment ça disait dans la chanson ? Tout s’en va, répondent les peintres, qui finalement sont loin avant les maçons.
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