Blog suisse de littérature

Blaise Pascal, Pensées

  • Vincent Francey

L’homme, dont nous ne saurions affirmer qu’il est un animal raisonnable ainsi que le prétendent certains observateurs mal informés quant à sa fragile condition de bipède sans aile qui ne pond pas d’œuf, l’homme, ce chef-d’œuvre en péril qui met à lui tout seul – disons plutôt à lui quelques milliards – en péril la planète entière, l’homme, c’est un fait dont ne sauraient douter même les plus sceptiques des philosophes, l’homme n’a qu’à bien se tenir s’il veut survivre aux catastrophes qui le menacent désormais dans son existence même, catastrophes dont nous ne ferons – nous ne nous en sentons pas la force – pas ici le catalogue exhaustif et dont nous percevons un modeste échantillon en cette période de troubles qui semble tout à fait inédite mais qui n’est assurément que le prélude à d’autres catastrophes qui feront passer ce petit virus de rien du tout pour une anecdote historique occupant, à l’instar de la grippe espagnole, une ou deux lignes dans les livres d’histoire à venir car ce qu’il serait temps de lui dire, à l’homme, et bien sûr aussi à la femme sa compagne et sa complice et surtout à ses enfants qu’il élève dans le déni de cette évidence que d’obscurs tabous nous empêche de proférer à la face du monde tant la fierté de l’homme en est mise à mal, tant, si on le dit, l’homme perd tout honneur et toute dignité, évidence qu’il est néanmoins nécessaire de hurler à tous les hommes et à toutes les femmes et à tous les enfants de la terre : mon petit qui te crois si intelligent, si supérieur à toute autre forme de vie sur terre, mon petit pet dans l’eau qui te prends pour un océan, ma crotte, mon ciron, mon crouille machin mou coincé entre deux infinis, tu n’es qu’un misérable sot, et plus sot que toi, homme qui te compares à Dieu et qui n’est que boyaux sur pattes, plus sot qu’un sot comme toi, c’est deux sots et si j’étais un bot, homme, je te cracherais contre ; voilà ce qu’il faudrait lui gueuler dans les oreilles, voilà le secret qui doit éclater au grand jour, c’est un secret de polichinelle bien sûr, tout le monde sait ce qu’est l’homme, tout le monde a constaté l’étendue de sa propre sottise en se regardant le matin dans la glace, tout le monde a bien vu que l’homme aurait beau faire des pieds et des mains pour se transcender, sot il est né, sot il vivra, sot il crèvera, tout le monde le sait mais personne, et c’est là le drame de l’homme, ne le croit.

Amplification d'une phrase tirée des Pensées de Blaise Pascal.


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Lie tes ratures, littérature, ce blog se veut l'atelier de mon écriture. J'y déverse en vrac des notes prises au jour le jour, l'expansion de ces notes en des textes plus élaborés, des réflexions et des délires, des définitions et des dérives, bref tout ce qui fait le quotidien d'un homme qui écrit, ici, en Suisse, ailleurs, dans mes rêves et à travers le monde qui m'entoure.

Bref, ce blog suisse de littérature partira dans des directions variées qui, je l'espère, sauront vous parler.