Blog suisse de littérature

19 octobre 2014

Hier soir, c’était soirée béton à Cousset.

Invitée : Alice la volubile.

Vidées : deux bouteilles de rouge, dont un merveilleux bordeaux tout droit sorti par hasard de la cave de la voisine.

Hurlées : mille perfidies à propos d'habitants du village, tous décédés depuis belle ou moins belle lurette.

Surgissent soudain des surnoms oubliés, véritables personnages de roman : Cottier, Kaké, Squitch et surtout « l’homme à la valise ». Beau titre… A réfléchir… Il s’agissait de ceux à Cabanon, des pauvres bougres (on ne le dit plus ainsi, mais ils existent encore) qui vivaient chichement au bas du village. L’homme à la valise prenait le train. Que transportait-il ? On l’a toujours ignoré. Roman d’espionnage ? Roman policier ? Histoire de fesses ou d’amour ? Tout est possible.

Il y avait aussi le facteur Bizule, Kôkâ et Saucisse. Peut-être d'ailleurs était-ce la même personne. On pourrait se perdre à chercher leur identité disparue, un peu comme dans un roman de Modiano, en plus comique, sans aucun espoir de prix Nobel.

Mon oncle Hubert (lui aussi ferait un beau personnage de roman, avec sa moustache, ses bretelles et ses souvenirs de meunier, de scieur et de corififi sans bateau) dit qu’il n’a pas besoin d’aller au théâtre, qu’il lui suffit d’observer les gens qui passent, de guguer, de se laisser surprendre par les tics, les mimiques et les mille défauts de l’humanité villageoise.

Il semble hélas que les personnages de roman téléportés dans la réalité s’amenuisent, qu’ils s’uniformisent, qu’ils disparaissent même. Ceux que l’on croise se ressemblent tous. Est-ce parce qu’on n’a plus le temps de les observer ? Est-ce parce que tout le monde devient le sosie de tout le monde ? Est-ce parce que les gens, tellement plus réels que le peuple, s’enferment dans leurs villas clés en main et ne sortent plus que pour se fondre dans la masse anonyme des supermarchés ?

Les villages de jadis meurent à petit feu. On leur ferme la poste et l’épicerie, parce qu’on ne pense qu’au sacro-saint fric. On ne va plus couler à la laiterie. On truande le boucher et le boulanger. On ne construit plus que des prisons colorées pour télévores avachis qui ne supportent plus les clochettes au cou des vaches.

Il faudrait faire revivre les villages d’antan. Cela n'est hélas possible aujourd'hui que dans des romans. 


Post précédentTerrasse de la Schweizerhalle, vendredi 1er juillet 2016, 16h25Post suivantCommuniqué (n.m.)

Commentaires et réponses

×

Nom est requis!

Indiquez un nom valide

Adresse email valide requise!

Indiquez une adresse email valide

Commentaire est requis!

* Ces champs sont requis

Soyez le premier à commenter

A propos

Lie tes ratures, littérature, ce blog se veut l'atelier de mon écriture. J'y déverse en vrac des notes prises au jour le jour, l'expansion de ces notes en des textes plus élaborés, des réflexions et des délires, des définitions et des dérives, bref tout ce qui fait le quotidien d'un homme qui écrit, ici, en Suisse, ailleurs, dans mes rêves et à travers le monde qui m'entoure.

Bref, ce blog suisse de littérature partira dans des directions variées qui, je l'espère, sauront vous parler.