21 décembre 2014

• 11.09.2017

« Le glaïeul est un demi-deuil de l’eau mélancolique », médite Gaston Bachelard, accumulant avec délice les voyelles liquides.

L’hiver, l’eau se fige. Bachelard à aucun moment n’évoque la glace. Est-elle la négation de l’eau ou son aboutissement ? Je songe à l’aile du cygne de Mallarmé coincée dans la glace, à ce chant du cygne silencieux de l’hiver. Quand tombe la neige, plus rien ne parle. Tout se tait. Le silence blanchit. Mais le ciel bleu d’aujour’hui, parenthèse au cœur d’une nuit prolongée, semble déjà une prémisse au printemps, un appel des glaïeuls.

L’hiver, quand il se laisse attendre, n’est aussi qu’un demi-deuil. La nature ne dort pas tout à fait. Elle fait de l’insomnie. Elle ne rêve pas. Elle manque de repos, comme nous, qui courons à l’assaut des cadeaux, qui nous faisons du souci parce que nous ne savons pas ce qui fera plaisir dans la masse compacte comme un bloc de glace des marchandises qui s’entassent et se jettent à l’infini.

A Cuba, on répare les briquets. Le journaliste occidental en est outré. Il faudrait jeter. La pauvreté pourtant a du bon. Elle force à l’écologie. Peut-être qu’elle permettra bientôt un retour de la neige et de la glace.

Bachelard ne dit rien non plus de la rêverie de la neige, de sa blancheur, de sa fraîcheur, de son goût d’enfance. Sans doute la neige se rapproche-t-elle, comme l’eau, du lait, mais d’un lait plus léger, d’un lait qui s’évapore, d’un lait qui fond comme glace au soleil. La neige est la victoire tranquille de l’eau sur le feu. Elle ne dure jamais bien longtemps.

Bientôt, à Cuba aussi, on jettera les briquets.